Stop aux rats dans la ville : quels remèdes et solutions industrielles durables ?

Stop aux rats dans la ville : quels remèdes et solutions industrielles durables ?

Cet événement aura lieu jeudi 15 mai 2025 à 18h à l’Hôtel de l’industrie à Paris et sur YouTube

Avec les interventions de :
Jeanne Brugère Picoux, Professeur honoraire de l’École nationale vétérinaire d’Alfort
Stéphane Bras, porte-parole de l’association Prosane, qui réunit les principaux acteurs de l’hygiène antiparasitaire

Modérateur :
Laurence Paye-Jeanneney, ancienne présidente de l’AFAS


Le rat d’égout prolifère de façon inquiétante dans les grandes villes, en particulier dans la capitale où son statut fait débat. Qu’on le nomme Rattus norvegicus, rat brun ou surmulot, c’est la plus nuisible des espèces commensales de l’Homme en raison de ses grandes capacités d’adaptation, de ses exigences alimentaires, de son intense prolificité et surtout, des zoonoses bactériennes, virales et parasitaires dont il peut être vecteur.

Les rats d’égout profilèrent en milieu urbain dans les zones où ils trouvent des ressources alimentaires, de l’eau et des endroits pour nicher. Avec un ratio de 1,5 à 1,75 rats par habitant, Paris et Marseille feraient partie des 10 villes les plus infestées au monde. À un tel niveau de densité de population, ces rongeurs à vie nocturne sortent des caves et des égouts et deviennent visibles le jour dans les rues, les parcs et les jardins, dans tous les lieux où ils peuvent trouver de quoi se nourrir et s’hydrater (caniveaux, poubelles, aires de pique-nique, marchés, habitations…).

Certains courants de pensée, défenseurs de la condition animale, arguent que Rattus norvegicus est l’espèce dont dérive le rat domestique d’élevage, facile à apprivoiser comme rat de laboratoire ou animal de compagnie non traditionnel (ACNT). Plaidant pour que la relation entre le rat d’égout et l’Homme ne soit plus considérée comme un commensalisme nuisible, mais comme une véritable symbiose, ils demandent de « légitimer la place des rats dans la ville », de reconnaître leur utilité comme « auxiliaires dans la gestion des déchets en ville… » Face à ces propos l’Académie nationale de médecine a tenu à rappeler en juillet 2022 qu’il fallait savoir choisir en la santé publique et le bien-être du rat d’égout. Ce dernier reste une menace pour la santé humaine en raison des nombreuses zoonoses transmissibles par ses parasites, ses déjections, ses morsures ou ses griffures.



Jeanne Brugère Picoux est vétérinaire, agrégée de pathologie médicale du bétail et des animaux de basse-cour, professeur honoraire de l’École nationale vétérinaire d’Alfort, Académie nationale de médecine, Académie vétérinaire de France, membre du Collège européen de santé publique vétérinaire, et élue « Vétérinaire de l’année » en 2009.

Stéphane Bras est vice-président et porte-parole l’association Prosane, qui réunit les principaux acteurs de l’hygiène antiparasitaire.

Laurence Paye-Jeanneney, est ancienne titulaire de la chaire « Recherche technologique et compétitivité économique » et ancienne administratrice générale du Conservatoire national des arts et métiers. Elle est également ancienne présidente de l’AFAS.


Cycle de conférences
Pour le Développement des Sciences et de l’Innovation (PDSI) au service des transitions

Rencontres d’information scientifique et technologique, à visée pédagogique et didactique, autour d’un scientifique et d’un acteur socio-économique, qui présentent une thématique à travers leurs connaissances et leurs expériences, contribuant à décrypter et présenter des solutions répondant aux enjeux de transition économique, sociétale, technologique, numérique et/ou environnementale.

Partenariat : AFAS – Société d’encouragement pour l’industrie nationaleSociété des ingénieurs et scientifiques de France (Ile-de-France)
Avec le soutien d’EcoLearn, MR21, e5t, BNI Saint-Germain-des-Prés, Pariscience, Cnes, CNRS, ABG

La production d’ammoniac : une synthèse plus que centenaire toujours en évolution

La production d’ammoniac : une synthèse plus que centenaire toujours en évolution
Usine de production d’ammoniac, dans le complexe chimique de Linz, en Autriche (classée Seveso). (c) Gerry1987

La production d’ammoniac NH3 est une des plus importantes synthèses de la chimie industrielle. On en produit en France moins de 700 000 tonnes alors que la production mondiale est de plus de 180 millions de tonnes. L’ammoniac est majoritairement utilisé pour fabriquer les engrais azotés : urée, nitrate d’ammonium ainsi que les explosifs civils et militaires par l’intermédiaire de l’acide nitrique mais aussi une foule d’applications : acrylonitrile, fluide réfrigérant, etc. En France, quatre usines le produisent. Elles sont situées près de Rouen, Le Havre, au sud de l’Alsace et en Seine et Marne. Cette dernière, située à Grandpuits vient d’ailleurs de cesser sa production. Toutes appartiennent à des groupes étrangers : norvégien et tchèque. L’hydrogène nécessaire à la production d’ammoniac provient majoritairement en France du gaz naturel et ces usines sont pénalisées par le coût du méthane qui fluctue en fonction de la situation internationale.

Au XIXème siècle les engrais azotés et l’acide nitrique étaient obtenus à partir du guano et du caliche d’Amérique du Sud. À la fin de ce siècle, les ressources étant susceptibles de se tarir ou l’approvisionnement d’être perturbé, il a fallu tenter d’obtenir l’ammoniac d’une autre manière. Les chimistes ont commencé à travailler sur la synthèse de l’ammoniac à partir de l’azote de l’air et de l’hydrogène. Malheureusement le diazote est une molécule où les deux atomes sont liés par une triple liaison et sa réactivité est très faible. C’est seulement en 1909 que le chimiste allemand, Fritz Haber, va réaliser la synthèse. La réaction est une réaction équilibrée et exothermique. Elle est donc favorisée par les hautes pressions et la basse température. Cette basse température est antinomique avec la cinétique de la réaction qui demande une température élevée, ce qui implique un catalyseur. De plus le faible rendement impose un important recyclage des gaz.

En 1919, Carl Bosch de la BASF met au point la synthèse industrielle. Elle est techniquement très complexe car elle nécessite une pression de plusieurs centaines de bars et plusieurs centaines de degrés. De plus, à ces températures et pressions, l’hydrogène et l’azote fragilisent le métal (d’où l’explosion du réacteur d’ammoniac à Mazingarbe le 1er mars 1972). Le premier réacteur industriel a d’ailleurs été réalisé par le fabricant de canons Krupp. Les difficultés techniques vont en partie être résolues et en 1918, 100 000 tonnes d’azote étaient consommées par le procédé Haber Bosch. Ceci a permis aux allemands de surmonter le blocus sur les minerais d’Amérique du Sud et de fabriquer les explosifs pendant la première guerre mondiale. Après la guerre, l’ammoniac allemand a permis de produire de grosses quantités d’engrais azotés. C’est pour cela que le 21 septembre 1921 (exactement 80 ans avant l’explosion, due à des nitrates d’ammonium, à l’usine AZF de Toulouse) un important stockage d’engrais contenant du nitrate d’ammonium a explosé détruisant la ville d’Oppau. Actuellement diverses sociétés produisent des réacteurs pour la synthèse de l’ammoniac. On peut citer les noms de Casale, Haldor Topsoe, Kellog, Brown and Root, etc. Ce sont des merveilles de technologie, beaux exemples d’application de la science du génie des procédés et de la métallurgie.

La production d’ammoniac étant vitale pour les engrais azotés et étant à l’origine d’une forte pollution, elle fait l’objet de nombreuses recherches que l’on peut classer en trois points :

Le premier consiste à séquestrer le CO2 produit ou à utiliser de l’hydrogène plus vert en remplaçant sa production à partir du charbon ou des hydrocarbures par de l’hydrogène provenant de l’électrolyse de l’eau voire l’hydrogène naturel.

Le deuxième point consiste en l’amélioration du catalyseur pour réaliser la synthèse dans des conditions plus douces en pression et en température. Les premiers catalyseurs étaient à base de fer. Diverses recherches montrent l’efficacité du ruthénium et plus récemment de complexes du lutécium.

Le troisième point correspond à divers essais susceptibles d’applications à très long terme du type : utilisation de plasma pour affaiblir la triple liaison azote-azote ou tenter d’imiter les plantes dont certaines comme les légumineuses sont capables d’absorber l’azote de l’air.

On constate que la synthèse de l’ammoniac réalisée depuis plus de cent ans fait toujours l’objet d’importantes recherches susceptibles de résoudre tous les problèmes économiques et environnementaux que sa production implique.

Alain Delacroix

Professeur honoraire, chaire « Chimie industrielle – Génie des procédés » du Conservatoire national des arts et métiers

[Santé animale] Grippe aviaire aux États-Unis

[Santé animale] Grippe aviaire aux États-Unis
@Pexels

Une proposition saugrenue et inquiétante du ministre de la santé américain Robert Kennedy Jr pour lutter contre la « grippe aviaire » aux États-Unis : laisser le virus se propager pour sélectionner des volailles immunisées.

Une telle proposition témoigne d’une méconnaissance totale de la panzootie de peste aviaire qui sévit actuellement aux États-Unis. Elle est due à un virus influenza A hautement pathogène (IAHP) qui provoque une septicémie rapidement mortelle pouvant atteindre l’ensemble du troupeau. Avec un taux de mortalité proche de 100% avec ces virus IAHP, il est utopique de vouloir garder les rares volailles survivantes pour sélectionner des sujets immunisés dans un système d’élevage avicole qui pratique le « tout dedans-tout dehors ».

Au contraire c’est favoriser l’extension de la maladie dans le pays. Ce virus ne connaît pas les frontières car il touche aussi les oiseaux sauvages qui favorisent sa propagation. L’arrêt des mesures sanitaires limitant la contamination des élevages aviaires serait une véritable catastrophe pour les éleveurs : pertes économiques par l’augmentation des élevages atteints et la mortalité animale, perte d’une sélection génétique dans certains élevages de reproducteurs (dont les lignées de grand-parentaux). Au niveau international, les produits avicoles ne pourraient plus être exportés.

Économiquement, les consommateurs seront également concernés. Actuellement les produits avicoles ont augmenté sur le marché américain notamment les œufs (d’où la nécessité d’en importer). Ce déficit s’accentuera obligatoirement pour les œufs comme pour la viande.

Même si actuellement il n’y a pas de risque de pandémie lié à un virus de la peste aviaire car il n’y a jamais eu de contamination interhumaine, il n’est pas souhaitable de favoriser la multiplication d’un virus qui peut muter et favoriser ainsi l’apparition de nouveaux variants.

Il faut espérer que la proposition désastreuse du ministre Robert Kennedy Jr ne sera pas appliquée.

Jeanne Brugère-Picoux

Professeur honoraire de pathologie médicale du bétail et des animaux de basse-cour (Ecole nationale vétérinaire d’Alfort), membre de l’Académie nationale de médecine, présidente honoraire de l’Académie vétérinaire de France

Texte publié le 27/03/25