La bible des codes secrets

Hervé Lehning

(Flammarion, 2019, 464 p. 25€)

 
La bible des codes secrets (H. Lehning, Flammarion, 2019) C’est avec un plaisir évident, et qu’il sait nous faire partager, que l’auteur nous amène à plonger dans l’histoire de la cryptologie au travers de multiples anecdotes extrêmement bien choisies, détaillées et référencées. Indispensable dans les domaines diplomatiques, militaires, des affaires commerciales, mais aussi ceux des relations amoureuses et des sociétés secrètes, la science des codes secrets remonte à très loin et se poursuit dans le temps présent.

Par exemple, vous serez bien étonnés d’apprendre que le chiffre utilisé par César l’ait été encore au moins deux fois à l’époque « moderne », que ce soit par les Sudistes pendant la guerre de Sécession ou par les Russes au début de la première guerre mondiale. Par contre, vous admettrez facilement que l’écriture secrète soit l’un des soixante-quatre arts de la concubine selon le Kamasutra.

L’astuce est de partir de ces anecdotes, et il y en a d’innombrables, pour inviter le lecteur à entrer lui-même dans le système de codage, de décryptage, et à s’y exercer lui-même. Comment résister aux messages donnés pour Edgar A. Poe, Jules Verne, Willy (celui de Colette) ou encore pour les initiés des sociétés secrètes (Templiers, francs-maçons…), que nous arrivons finalement à décrypter et à reproduire nous-mêmes sur leurs modèles. Nous sommes littéralement entraînés par une multitude d’exemples tous plus attrayants les uns que les autres, dont l’auteur nous donne les clés pour pouvoir en profiter. Au passage, nous apprenons qu’il ne faut jamais croire qu’un code puisse être inviolable et qu’il est indispensable d’en modifier le chiffre à tous moments. Idem pour nos mots de passe !

La saga des dictionnaires chiffrés, pour faire correspondre mots et nombres, est décrite depuis la première guerre mondiale (y compris l’affaire Dreyfus) jusqu’à l’avènement des machines électromécaniques, telle celle bien connue d’Enigma ; machine d’abord conçue pour des relations commerciales avant d’être adoptée par l’armée allemande de la seconde guerre mondiale. Son système de chiffrage, la façon dont chaque code a pu être cassé sont parfaitement expliqués et paraissent tout à fait accessibles à chacun : c’est la magie de ce livre, tout est vraiment simple. Il suffisait d’y penser.

Les derniers chapitres abordent l’ère numérique et la cryptographie quantique. Dans ce contexte où tout devient immatériel, où la confidentialité se perd dans le cloud, des protections se mettent en place pour sécuriser les communications, telles celles de la blockchain. Il faut protéger les données, surveiller les trafics illégaux, assurer des précautions élémentaires pour éviter tout espionnage. Encore une fois, le lecteur est amené à comprendre les mécanismes mis en jeu et les solutions apportées. Et finalement à accepter qu’actuellement les ordinateurs contenant des secrets ne doivent pas être connectés à Internet, ni raccordés à des ordinateurs eux-mêmes connectés au réseau !

Ce livre est un vrai parcours initiatique à travers les codes secrets. On suit leurs histoires, leurs évolutions, leurs échecs et leurs victoires. On est constamment invité à y participer. Ce qui est remarquable, c’est à la fois l’attractivité du texte et sa réelle accessibilité pour tous. A chacun de le parcourir selon son idée, livre d’histoire et/ou exercices mathématiques.
Oui, il s’agit bien d’une vraie « bible » de la cryptologie, c’est à dire LE livre de référence des codes secrets.