Gustave Trouvé : un inventeur génial français trop méconnu

Alain Delacroix

Professeur honoraire, chaire «Chimie industrielle – Génie des procédés» du Conservatoire national des arts et métiers
 

Le tricycle électrique de Gustave Trouvé (Jacques Cattelin, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons)

Le 26 septembre 1887, au congrès de l’Association française pour l’avancement des sciences, un «électricien, ingénieur à Paris» présente plusieurs appareils liés à la fée électricité : des polyscopes cliniques, une lampe de sécurité, un photophore, une lampe sous-marine et un nouvel interrupteur. Mais ce qui étonne le plus les participants, c’est l’utilisation de l’auxanoscope électrique quand ils voient projetés sur un écran les portraits de Chevreuil, de Pasteur et de divers objets.

Qui est ce Géo Trouvetout français ? Il s’agit de Gustave Trouvé qui, avec l’initiale de son prénom, a un patronyme prédestiné – G. (j’ai) trouvé ! Né en 1839 à La Haye-Descartes en Indre-et-Loire, il est le fils d’un marchand de bétail. Après des études au collège de Chinon, il apprend la serrurerie et commence en 1855 des études à l’Ecole des arts et métiers d’Angers, qu’il ne terminera pas. Il part alors à Paris et travaille chez un horloger. A partir de 1865, il habite 5 rue Montesquieu et y produit son premier brevet : une pile minuscule portative permettant l’animation des bijoux et divers objets d’art. En 1866, il déménage au 6 rue Thérèse et c’est là qu’il enregistre sa marque de fabrique Eureka – «j’ai trouvé» en grec ancien, ce qui correspond à l’initiale de son prénom et à son nom. Il va alors produire un nombre considérable d’inventions. Il aide, entre autres, Léon Foucault à résoudre le problème de la durée de rotation de son gyroscope en y installant un système électro-moteur. C’est Henri Tresca, sous-directeur au Conservatoire des arts et métiers, qui a suggéré à Foucault de rencontrer Gustave Trouvé, de vingt ans son cadet.

En 1867, il expose un fusil électrique à l’Exposition universelle de Paris, qui est très apprécié par l’empereur Napoléon III. En 1869, il présente un explorateur extracteur électrique de corps étrangers ayant pénétré dans les tissus organiques, qui sera très utile lors de la guerre de 1870. En 1873, il produit le polyscope qui sert à explorer le corps humain.

Le 1er juillet 1878, il s’installe au 14 rue Vivienne et y installe son atelier et y poursuit ses inventions : un moteur électrique, un tricycle électrique qui est le premier véhicule de ce type au monde, un bateau à propulsion électrique, une machine à coudre électrique, le polyscope et le photophore qui servent d’éclairage électrique pour l’usage des médecins mais aussi pour les spectacles, une lampe de sécurité, l’auxanoscope qui est l’ancêtre des projecteurs, etc.

En 1902, en travaillant sur un appareil utilisant la lumière ultraviolette pour traiter les maladies de peau, il se blesse, sa plaie s’infecte et il meurt de septicémie à l’hôpital Saint-Louis le 27 juillet. Gustave Trouvé n’ayant pas de descendants et ses archives à la mairie de La Haye-Descartes ayant brûlé en 1980, il tombe dans l’oubli. Même ses restes seront jetés dans la fosse commune lorsque la concession de sa tombe sera arrivée à échéance.

Pourtant on doit à Gustave Trouvé plus de soixante-dix inventions liées à l’électricité. Grâce à un historien anglais, Kevin Desmond, qui a écrit sa biographie, on commence à le réhabiliter et plusieurs plaques ont été déposées aux endroits où il a habité. Le musée national des techniques du Conservatoire national des Arts et Métiers possède dix-neuf objets construits par Gustave Trouvé, mais à ce jour, aucun n’est exposé.