Premier cas mondial de grippe humaine (et non aviaire) due à un virus influenza H10N3

Jeanne Brugère-Picoux

Professeur honoraire de pathologie médicale du bétail et des animaux de basse-cour (Ecole nationale vétérinaire d’Alfort), membre de l’Académie nationale de médecine, présidente honoraire de l’Académie vétérinaire de France
 

L’agence Reuters a annoncé le 1er juin 2021 un cas de «grippe aviaire» dû à un virus influenza H10N3, chez un Chinois âgé de 41 ans, de la ville de Zhenjiang. L’homme, hospitalisé le 28 avril dernier, est maintenant guéri.

On ne connaît pas l’origine de cette infection humaine mais il faut noter que pour cette souche H10N3 :

  • il s’agit du premier cas mondial de grippe humaine due à cette souche ;
  • elle n’a jamais été isolée chez des volailles ;
  • elle est rarement isolée chez des oiseaux sauvages (160 isolats signalés pendant les quarante années avant 2018 en Asie et en Amérique du Nord) ;
  • elle est considérée comme étant faiblement pathogène.

Si, pour le moment, on peut considérer qu’il s’agit d’un cas exceptionnel de grippe humaine due à une souche rarement rencontrée, on peut regretter une fois de plus le terme de grippe aviaire annoncé par l’agence Reuters alors que les volailles ne sont pas concernées dans ce cas.

Par ailleurs, l’illustration choisie pour cette dépêche est fort regrettable : il s’agit d’une photo datant d’avril 2013 signalant une vaccination de poussins âgés d’un jour contre la souche d’influenza aviaire H7N9 qui a tué plus de Chinois en cinq ans que la souche H5N1 hautement pathogène en dix-sept ans (soit de 2003 à janvier 2020, 861 malades, dont 455 morts).
Cette souche H7N9, faiblement pathogène pour les volailles lorsqu’elle apparue en février 2013, a contaminé jusqu’au 6 décembre 2019, 1568 personnes (dont 616 décès) en Chine (quelques cas ont été signalés à Taïwan), cette contamination étant principalement observée dans les marchés de volailles vivantes. Or la vaccination des volailles n’a été mise en place en Chine qu’en 2017, dans le but d’une part, de lutter contre cette souche H7N9 devenue hautement pathogène pour les volailles (et l’on parle alors de peste aviaire) mais surtout d’autre part, pour éviter une nouvelle vague de cas humains [1].
Rappelons aussi qu’il n’y a jamais eu de transmission interhumaine avec les souches de peste aviaire H5N1 et H7N9.

 

[1] Zeng X., Tian G., Shi J., Deng G., Li C., Chen H. Vaccination of Poultry Successfully Eliminated Human Infection with H7N9 Virus in China. Sci China Life Sci. 2018, Dec;61(12):1465-1473. doi: 10.1007/s11427-018-9420-1. Epub 2018 Nov 7. PMID: 30414008.