Recherche, sciences et stéréotypes

Claudine Hermann

Présidente d’honneur de l’association Femmes & Sciences, présidente de l’European Platform of Women Scientists (EPWS)
 

Recherche, sciences et stéréotypes

Le Forum Science, Recherche et Société 2017 s’est tenu les 29 et 30 septembre à la Cité des sciences et de l’industrie à Paris. Il permet un échange entre les Français et les chercheurs, les philosophes et les acteurs de la société civile, sur l’actualité scientifique et sa contribution aux changements de nos vies.

Cette année, La Recherche et Sciences et Avenir ont fait réaliser une enquête autour des stéréotypes sexistes dans la science et la recherche. Un échantillon de 1000 Français, âgés de 15 ans et plus, a été interrogé sur Internet par Ipsos Sopra Steria.

Les résultats de l’enquête

Les Français sont intéressés par la science et ont confiance dans ses avancées, même si certaines inquiétudes s’expriment. Ils considèrent que les filles sont plus douées que les garçons dans les matières scientifiques à l’école et voient la réussite des femmes dans les carrières scientifiques équivalente à celle des hommes (ce qui n’est pas généralement le cas). Beaucoup pensent que les femmes sont « naturellement » intuitives et les hommes « naturellement » cartésiens, et un tiers des personnes interrogées considèrent que les femmes ont des cerveaux moins adaptés aux sciences que ceux des hommes : beaucoup de clichés ont la vie dure… Les Français.es encouragent leurs filles (et leur garçons) à s’orienter vers des métiers scientifiques ou techniques et pensent que la présence de davantage de femmes serait bénéfique pour la recherche.

La table ronde autour de cette enquête et les échanges d’expérience

Ont participé à cette table ronde : Etienne Mercier, Ipsos, qui a réalisé l’enquête et son analyse ; Marie-Agnès Bernardis, Universcience ; Elsa Lorthe, lauréate de la bourse L’Oréal-Unesco 2016 pour les femmes et la science ; Claudine Hermann, en tant que présidente d’honneur de l’association Femmes & Sciences et présidente de l’European Platform of Women Scientists (EPWS) ; Dominique Leglu et Philippe Pajot, La Recherche.
En 1h30 de débat, entièrement filmé et disponible sur le site de La Recherche, le vaste sujet de la place des femmes en sciences et de l’orientation des filles vers ces voies n’a pas été épuisé ! Elsa Lorthe, sage-femme terminant actuellement une thèse sur les prématurés, et Claudine Hermann, professeure honoraire de physique à l’École polytechnique, ont présenté leurs parcours de femmes scientifiques, se déroulant à presque un demi-siècle d’écart.

Marie-Agnès Bernardis a décrit les activités menées par la Cité des sciences et de l’industrie pour donner aux jeunes, et en particulier aux jeunes filles, le goût des sciences : en ce moment Universcience est partenaire du projet européen Hypatia, qui regroupe des musées de sciences à travers l’Europe et cherche à présenter une science inclusive pour les filles et les garçons.

Claudine Hermann a indiqué les activités de l’association Femmes & Sciences, qui va à la rencontre des jeunes de collèges et de lycées et a produit des vidéos proposant des modèles accessibles de femmes scientifiques. Un livret de 40 portraits de femmes scientifiques du passé et d’aujourd’hui est en cours de réalisation par cette association, à l’intention particulièrement des éducateurs et des éditeurs de manuels scolaires, pour que ces derniers illustrent leurs manuels de sciences avec des figures féminines, qui font aujourd’hui très souvent défaut.

Les recommandations de l’enquête pour améliorer la motivation des jeunes filles pour les sciences

Les pistes proposées dans l’enquête

  • sensibiliser le corps enseignant à la manière de présenter les métiers de la recherche,
  • présenter des modèles vivants ou dans le contenu de l’enseignement,
  • développer des programmes contre le sexisme et les stéréotypes,

sont approuvées quasi unanimement par les personnes interrogées, hommes ou femmes. Elles rejoignent les préconisations des associations de femmes scientifiques. Ces dernières, ainsi que les entités impliquées dans la promotion des sciences et techniques pour les filles (Fondation L’Oréal, CGénial, Elles bougent !…), s’attachent à faire intervenir des femmes exerçant des métiers scientifiques et techniques dans les classes.
Il reste à toucher une proportion plus importante de la jeunesse et surtout les parents et les proches, qui influencent les choix d’orientation des jeunes.

Améliorer la situation présente est un travail de longue haleine, qui nécessite la collaboration de toutes les parties concernées, mais est essentiel pour l’avenir de notre pays.